TOP 14 - 23ème journée : UBB / USAP

On vous rassure de suite. À Moga, Vincent Etcheto continue à défier ses buteurs et à s'enflammer pour les échauffements à toucher, n'hésite pas à chambrer (et se faire chambrer), prend soin de rappeler la maxime héritée de son père dès que l'on parle philosophie de vie : « Être sérieux, sans se prendre au sérieux. » Il n'y a toujours pas besoin, non plus, de le pousser très loin pour qu'il dise ce qu'il pense. Et pourtant, quelque chose a changé. Non ? Si. Vous l'avez peut-être remarqué : depuis quinze jours, la parole de l'entraîneur des arrières de l'Union Bordeaux-Bègles dans les médias s'est faite rare.

Pas le fait (seulement) des adversaires - l'Aviron samedi et Perpignan ce soir - mais le fruit de la volonté de partager le temps de parole au sein du staff, quand les médias fonçaient naturellement chercher l'analyse et la faconde du disert Bayonnais. « J'en ai discuté avec lui, mais pas que moi, d'autres gens importants au club aussi, dit le président Laurent Marti. Il a parfois engagé l'image du club sur des prises de position personnelles qui pouvaient être vécues comme un manque de respect. »

« Laurent et Raph' (Ibanez) me freinent parfois et ils ont raison. J'ai été maladroit quand j'ai blessé des gens, un club. Mais je ne serai jamais langue de bois. Je me rends juste compte que parfois il vaut mieux s'abstenir. »

« Il a clarifié son message »

Ainsi va Vincent Etcheto. Parfois décrié pour ce « jeu » chez lui aussi naturel que l'autre, mais adoré par beaucoup de ses supporteurs, dont certains ont même imprimé des t-shirts à son effigie (en Che Guevara). Il est avant tout ce technicien choisi par Laurent Marti au Boucau en 2009, devenu aujourd'hui, avec le préparateur physique Ludovic Loustau, le plus ancien du staff technique d'un club qui n'a fait que progresser. Et lui ?

« Il n'a pas complètement coupé le cordon avec sa carrière de joueur et c'est son charme, sourit le capitaine Matthew Clarkin. Mais il a évolué. Il sent mieux quand il faut être souple et quand il faut se fixer sur l'objectif. Il fait passer son message avec plus de clarté, d'efficacité. »

« Il sait ce qu'il veut, où il va, gueuler quand ça ne va pas, affirme l'ouvreur Pierre Bernard qui l'a découvert cette saison. À mon poste c'est un plaisir de travailler avec lui : il y a joué, a été buteur, il connaît le rugby et c'est un passionné »

C'est cette flamme et ces idées offensives qui avaient séduit son président au moment de l'associer à Marc Delpoux, de retour ce soir avec l'USAP, pour trois saisons. Le choc des personnalités a varié entre le tiède et le froid mais la collaboration a été fructueuse. « Avec Marc, j'ai progressé sur la circulation sur les premiers temps de jeu, dans l'analyse vidéo que je découvrais. Rien de plus, car on s'opposait dans la façon de travailler. Avec Raphaël (Ibanez) et Régis (Sonnes), on est dans la complémentarité. On est dans la confrontation des idées, capable de s'engueuler pour trouver une solution, mais on s'est trouvé sur le jeu, la gestion humaine. » « Il a reçu plus de responsabilités et je pense que ça l'a aidé à avancer », ajoute Matthew Clarkin.

Apaisé ? « J'ai eu un problème avec un arbitre (M. Berdos), en 2011, et on m'a collé une étiquette d'excité alors que je n'ai plus rien dit depuis », dit le doyen des coachs de l'UBB (45 ans). « Je vis, c'est tout. Je suis toujours enthousiaste mais, avec l'âge aussi peut-être, j'ai pris plus de recul sur le quotidien, les matchs. »

« Il peut aller plus loin »

L'essence de ses mots n'a pas fondamentalement évolué. « Importance de la technique en mouvement », « éviter la lassitude », « faire comprendre que les choses les plus simples sont les plus efficaces », « persuader les joueurs qu'à chaque problème, il y a une solution qui passe par le cadre collectif », « toujours chercher à améliorer, en regardant le haut niveau et me demandant ce que, joueur, j'aurais souhaité ou fait », « droit de se tromper. »

Toujours jusqu'au-boutiste ? « Oui, comme Raph'et Régis dans leurs secteurs. On l'attend de l'autre. » « Il est un symbole du club, oui, répond Laurent Marti. Mais comme Régis (Sonnes) avec son béret et ses Crocs. »

Ancienneté et proximité ne veulent pas dire blanc-seing à l'UBB. Cet automne, au moment d'évoquer sa prolongation jusqu'en 2016, le Basque qui retourne le mercredi dans sa maison de Tarnos, avait préparé son dossier d'entretien. Le président, lui, l'a poussé. Et le pousse encore. « Aujourd'hui, il a progressé dans tous les secteurs. Mais je reste convaincu qu'il peut aller plus loin. »

Et, en fait, si un jour (inéluctable ?) le nom de Raphaël Ibanez apparaît autour l'équipe de France, serait-il candidat pour l'accompagner ? À la question au débotté, il s'est marré. C'était après l'ouverture de son couvre-feu médiatique.

Avant, il s'était projeté sur ce sprint final et sur les ambitions de ce club où il se voit s'inscrire dans la durée. « À Bayonne, on a eu la peur de gagner. C'est une bêtise. On a tout à gagner. On doit être encore plus volontaire, plus précis, ne pas avoir peur et aller au bout de nos convictions. »

Non, il n'a pas tant changé que ça.